lundi 11 janvier 2010

Au secours Pardon.





"La beauté est une équation mathématique : par exemple, la distance entre la base du nez et le menton doit être la même qu'entre le haut du front et les sourcils. Il y a des règles à respecter : ainsi, le "nombre d'or" (1,61803399) qui est la hauteur de la pyramide de Kheops divisée par sa demi-base. Si vous divisez votre taille par la distance sol-nombril, vous devez obtenir ce chiffre, qui doit aussi être égal à la distance sol nombril divisé par la distance nombril-sommet du crâne. Sinon, vous êtes imbaisable.

 [...]

Savoir ce qui faisait bander les hommes était mon métier.
Les filles qui font consommer les femmes sont celles qui excitent leur mari. Or, ce qui excitait les hommes, au début du 21ème siècle, c'était la pureté. Tout le monde voulait de la pureté, probablement que les gens se trouvaient tous dégoûtants. Les hommes n'étaient plus attirés que par des physiques enfantins, et, en conséquence, les femmes se déguisaient toutes en fillettes roses. Je me suis toujours méfié des hommes qui s'affichent avec des gamines : ce sont des frimeurs tropéziens ou des homosexuels refoulés. Ils se pavanent avec elles comme des automobilistes au volant de leur nouveau coupé sport. En cette époque où la jolie femme était devenue un trophée, certaines soirées ressemblaient à des concours de teckels : c'était à celui qui arborait la plus fraîche bestiole  son bras.

[...]

Au début, j'avais l'impression d'être le seul à m'inquiéter de voir toute une industrie devenir pédophile. Comme mes confrères semblaient tous trouver la situation normale, je cessais bientôt de m'en préoccuper. Et c'est ainsi que j'ai travaillé tranquillement à donner aux hommes du monde entier l'envie de coucher avec des enfants."

























C'est en lisant ce livre de Beigbeder  que la vérité m'a percuté comme une flèche en plein cœur. J'ai trouvé ça tellement limpide, tellement littérairement beau et tellement artistiquement vrai, que j'ai eu envie de vous le faire partager, juste comme ça.
Quand je pense que le dernier bouquin de ce mec, Un roman français, a reçu le prix Renaudot tout en ayant subi la censure, je me dis que ça sera le prochain article de ma wish list. Pour l'écrire, il est parti de deux nuits qu’il a passées en garde à vue en janvier dernier, alors qu'il avait été chopé à sniffer de la cocaïne sur le capot d'une voiture (et qu'il en avait plus de 2 grammes et demi dans les poches). Il a entre temps été gentiment invité à virer de sa version définitive un passage élogieux sur ledit procureur responsable de son incarcération, dans le but quelque peu contraint d'éviter l’outrage à magistrat...

Bref, il en a fait coulé, de l'encre et de la salive par sa provocante délicatesse vindicative.

D'une manière plus générale, je me demande s'il est possible d'être à la fois objectif, authentique,  ironique, et de plaire, tout ça à la fois ? Quand on dit aux gens les choses qu'ils ont envie d'entendre, ce n'est pas spécialement difficile d'être apprécié. Mais si tôt qu'on commence à mettre les pieds dans le plat en parlant des sujets qui gênent, par la recherche active d'une lucidité plus cynique, les choses deviennent moins simples. Ce mec en est la preuve vivante, mais ça ne l'a pas empêché de devenir l'un des écrivains les plus marquants de sa génération.

C'était juste pour vous faire partager un coup de cœur au talent presque outrageant.

Un love at the first sight, comme on dit.*

2 commentaires:

Norma Jean a dit…

tu vois je t'avais dit que c'était bien à lire.
Le problème de Beigbeder n'est pas sa plume, ni ses idées, bien au contraire, mais pour moi, chacune de ses lectures me fait tout voir en noir: les hommes, les femmes, les enfants. Parce que ce qui manque à Beigbeder, ce sont des valeurs à respecter, une conduite morale qui donne un sens à ses actes et à sa vie.
Pour autant, il a un talent manifeste, et il est l'une de mes principales inspirations.
ps: un roman français, on l'a offert à Alexandre pour Noel, il a beaucoup aimé.
ps 2: j'ai fini le Kundera que tu m'as offert: j'ai beaucoup aimé

Nyctalopia a dit…

Au sujet de ce que tu dis Sur Beigbeder, je suis tout à fait d'accord. Je me demande quand même si ça vie ressemble au chaos décrit dans ses bouquins (vue l'épisode de la coc, c'est possible que ce soit le cas, mais j'espère quand même pour lui que c'est "moins pire").

Sinon au sujet du Kundera, tu me le prêteras ?